dimanche 15 avril 2012

Ce Que j'appelle oubli...


Coincée au lit 4 jours à cause d'une rhino, qui dixit le médecin est le signe que mon système immunitaire s'habitue à mon nouveau milieu professionnel... ce que je traduis par “je suis comme un bébé en première année de crèche, je choppe tout ce qui passe”, je commence à péter un peu les plombs d'ennui ...
Seule sortie, hier soir, au studio-théâtre de la comédie française Ce que j'appelle oubli de Laurent Mauvignier. Denis Podalydès seul en scène, assez rigide, nous a présenté ce texte inspiré de ce fait divers de 2009 où un homme avait été battu à mort par des vigiles de supermarché parce qu'il avait volé une cannette de bière. Ce qui m'a plu dans le texte, c'est que Bertrand Mauvignier s'est focalisé sur cette phrase idiote du procureur qui disait qu'on ne tue pas un homme pour une cannette de bière... et que toute sa colère est partie de cette ânerie révélatrice de la bêtise de notre société, car bien sûre on ne tue pas point.
                      
Je suis complétement fauchée. J'ai accompagné la semaine dernière un voyage scolaire à Londres, et j'ai été assez idiote pour sortir 50 livres, que j'ai finalement dû dépenser en conneries. J'aurais dû tout payer par carte j'aurais moins dépensé car cette semaine ayant dû aller chez le médecin et acheter des médicaments je n'ai plus rien du tout.
Alors aujourd'hui après la présentation du texte hier soir, j'étais chez Dia, cherchant à utiliser le plus intelligemment possible mes derniers 1 euro 90. Et le texte qui hier était un peu irréel a pris soudain toute sa réalité... tout à coup j'étais l'homme qui a volé une cannette de bière. Hier encore un peu soumise à la fièvre, je regardais les mains crispées de Podalydès, (je pensais à mon professeur de théâtre Jack Waltzer et à l'exercice de la chanson) et puis tout en écoutant mon esprit vagabondait sur les films dans lesquels j'ai vu Podalydès. Je regardais le corps de l'acteur se laissant regarder, seulement armé d'un texte, et je repensais au personnage de Jeanne Balibar dans Ma vie sexuelle avec qui il sortait, qui s'appelle Valérie comme moi et aujourd'hui au Dia je repensais à elle dans le bal des actrices qui faisait aussi ses courses dans un magasin discount... Hier ce qui m'avait plu dans le texte, c'était l'affirmation que la valeur d'un homme ne repose pas sur sa valeur sociale, et aujourd'hui je voyais clairement, cruellement la réalité de ce Dia, magasin pour les pauvres, avec cette femme devant moi à la caisse qui parlait toute seule, et qui tutoyait la caissière, et ce système de sécurité supra high-tech, toutes ces caméras qui font bien attention à ce que les pauvres ne volent rien... et me revenait toute l'horreur réelle du monde, ce monde qui se nourrit de la misère et croit avoir un droit de vie et de mort sur elle, parce qu'elle se tait et préfère sombrer dans une sorte de folie. Cette indécence de ces 1% et de ceux qui y aspirent et parfois sont pauvres eux-même, qui pensent que certaines vies valent plus que d'autres... Et j'étais si proche de l'homme qui avait volé la cannette de bière parce qu'avec mes 1 euro 90 et encore 15 jours à tenir j'étais très tentée de voler... quoi? Une connerie des gâteaux... parce que j'ai des pâtes, plein, mais j'avais faim de conneries... et peut-être... parce que je n'ai vu le matériel high-tech, qu'une fois à la caisse, et peut-être que moi-aussi j'aurais volé et que pour ça on m'aurait battue à mort!

C'est étrange cette réalité qui est déplacée sur une scène de théâtre quand elle est au coin de la rue, c'est étrange que l'art soit parfois forcé de découper les paupières closes pour que les gens voient, et ce qui est plus étrange encore c'est que ce sont toujours les mêmes qui voient et les mêmes qui sont aveugles... Toute cette indécence... toute cette indécence qui ne leur fait pas mal aux yeux!
                                                      

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...